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Le Pays cathare ou Languedoc (Ariège, Aude, Haute-Garonne, Tarn)...

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...qui vous parlent de l'histoire, du patrimoine, des légendes du sud de la France.

Un monde si proche et si lointain de châteaux, de villages perchés, de pics et de forêts profondes s'ouvre désormais à vous.



"Les êtres et les choses sont créés et mis au monde non pour la production mais pour la beauté"
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"Ne soyez pas des régionalistes. Mais soyez de votre région."

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"Celui qui n'a pas de passion, il ne lui sert à rien d'avoir de la science."

Miguel de Unamuno

18 avril 2009 6 18 /04 /avril /2009 08:12

Dans la société d'Ancien régime (comme dans la nôtre, réputée plus humaine) certaines catégories de population faisaient l'objet d'ostracisme. On leur faisait porter des insignes distinctifs, on leur prêtait une influence délétère sur les choses et les gens... Ainsi les Juifs, les Cagots, les cathares, les lépreux, mais aussi, on l'oublie souvent, les prostituées.

Un document du XIVe siècle nous en dit beaucoup sur la manière dont on traitait ces hétaïres, principalement par le mépris et la méfiance, voire par ce qui peut nous apparaître, au XXIe siècle, comme une pure et simple ségrégation...

Les Privilèges de Saint-Félix

Récemment, en relisant l'Histoire de Saint-Félix de Caraman (actuellement Saint-Félix-de-Laurgais, Haute-Garonne) de G. B. Morère, j'ai parcouru le document  relatant les privilèges accordées à la ville par le Comte de Caraman, dont elle dépendait. Ces privilèges sont conservés dans un in-folio copié au XVIIe siècle, mais remonteraient au XIVe siècle. 

Le texte décrit l'ensemble des droits exercés par les consuls de la ville, les plus hautes autorités "municipales" de l'époque. Cela va de leur pouvoir judiciaire en matière criminelle, au contrôle qu'ils peuvent exercer sur la qualité de la viande et des chandelles.  Sont mentionnées aussi dans ce texte, et c'est ce qui nous intéresse, les dispositions qu'ils doivent prendre à l'égard des prostituées.

Logées à part

"Item habent et possunt ordinare et prohibere et defendere quod nulla meretrix sit ausa tenere lupanar in dicto loco seu ejus pertinentiis, nisi in loco per ipsos consules deputato seu deputando..."

" [Les consuls] peuvent ordonner et défendre que toute courtisane tienne une maison de passe dans ledit lieu (la ville de St-Félix) ou ses dépendances, si ce n'est dans un lieu par eux défini ou à définir..."

Premier règlement qui touche les prostituées, elles sont logées séparément, sans doute dans une rue spécialement affecté à cet usage. Il ne faut pas s'étonner de ce fonctionnement ; à Cordes, dans le Tarn, on pense qu'il existait une telle rue, réservée au commerce de la chair.

Femmes "impures"

"... quod nulla meretrix sit ausa aliquas carnes coctas seu crudas, panes, vina, poma, peras, ficus seu alios fuctus, caules seu alia victualia quaecunque tangere donec illos seu illas emerit..."

"... que nulle courtisane ne touche des chairs crues ou cuites, du pain, du vin, des pommes, des poires, des figues ou d'autres fruits, des choux (?) ou d'autres victuailles, avant de les avoir achetés..."

L'historien de St-Félix voit là une mesure élémentaire de "prophylaxie" (sans jeu de mot facile sur ce terme) contre les maladies, mais personnellement, je ne suis pas d'accord avec lui. Pourquoi seules les prostituées feraient alors l'objet de cette interdiction ? Nous sommes à une époque où les notions d'hygiène les plus élémentaires étaient ignorées. 

Selon moi, ce qui apparaît ici, c'est avant tout une croyance à une impureté attachée à la personne de la prostituée, capable de corrompre les aliments par simple contact de sa main. En effet, à l'époque médiévale (et après), les courtisanes étaient l'objet de nombreuses croyances de ce type. Par exemple, on les accusait traditionnellement de ternir les miroirs simplement en les regardant.

C'est dire si elles étaient jugées impures, quasiment intouchables, objet de suspicion... Le terme de "pute", féminin de l'ancien français "put", puant, garde encore les traces de cette méfiance et de ce mépris.

Ceux qui prenaient ces dispositions n'étaient-ils pas aussi parfois ceux qui ne rechignaient pas à toucher ces mêmes prostituées de temps à autre, sans témoins et sans grande peur de la contagion cette fois-ci ? On peut légitimement se poser la question...

Les stéréotypes contre les prostituées s'inscrivent dans l'ensemble plus vaste des stéréotypes anti-féminins, puisques les femmes menstruées, dans de nombreuses civilisations, sont également réputées impures. Jusqu'au XXe siècle par exemple, les femmes menstruées se voyaient refuser l'entrée du lavoir dans nos régions (voir à ce sujet l'article sur les lavoirs).

Signe distinctif

"... et non sit ausa potare intus tabernas nec jacere cum aliquo homine intus villam de die nec de nocte, nec ire per villam sine cordono"

" ... qu'elle ne boive pas dans les tavernes et ne couche pas avec un homme dans cette ville de jour ni de nuit, et qu'elle n'aille pas dans la ville sans cordon...".

Les allées et venues sont donc bien contrôlées, les prostituées ne peuvent exercer en dehors du lieu que les consuls leur ont assigné. Mieux, le cordon dont il est question est un signe distinctif, qui permet de les reconnaître au premier coup d'oeil et de les éviter. ce cordon peut nous évoquer la crécelle des lépreux, ou bien les croix jaunes que devaient porter sur leurs habits les "hérétiques" suspectés d'accointances cathares...

Bref...

La prostitution est donc tolérée comme un mal nécessaire, mais on fait tout pour que les prostituées soient contenues dans un quartier réservé, qu'on puisse les reconnaître et les fuir dans d'autres circonstances... On les accuse de corrompre la nourriture par simple contact. Cette catégorie de la population est bien stigmatisée. Les dispositions légales ne font qu'entretenir certains préjugés préexistants contre cette catégorie de la population. A l'inverse, la loi ne prévoyait pas de peine contre leurs clients, toutefois...

Sans trop interpréter, on peut supposer qu'une telle législation devait encourager une attitude faire de mépris et distance de la part de la population, et donc une vulnérabilité d'autant plus grande pour les prostituées, livrées à elles-mêmes dans un monde hostile...

Il serait intéressant de comparer avec d'autres législations municipales, pour voir si elles subissaient un traitement identique ailleurs.

Sources

G. B. Morère, Histoire de St-Félix de Caraman, 1899.

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commentaires

D
<br /> Bonjour,<br /> <br /> je souhaiterais avoir des précisions ou du moins davantage de lectures sur le sujet du marquage des prostituées fautives, la fleur de lys au fer rouge. Sauriez vous me conseiller des ouvrages,<br /> autres que les trois mousquetaires, s'il vous plaît?<br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> Belle référence littéraire ! Il faut que je fouine un peu dans ma bibliothèque pour vous répondre ; je vous donnerai la réponse dans la semaine, n'hésitez pas à me relancer si vous ne voyez rien<br /> venir d'ici huit jours. Cordialement.<br /> <br /> <br /> <br />
D
et merci au "bon" Saint Louis pour avoir inventé l'étoile jaune...
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A
<br /> Avez-vous des renseignements là-dessus ? Aurait-on à l'époque inventé un prototype d'étoile jaune ?<br /> <br /> <br />
H
Il me semble pourtant qu'un simple coup de rame simplifierait peut-être les choses...Mais il y a sûrement des gens qui ont peur de l'eau...
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A
<br /> D'où l'expression : mouiller sa chemise ! Mais il est certaines expériences qu'il vaut bien mieux ne pas vivre, et je pense que la prostitution en est une...<br /> <br /> <br />
H
Ah,ça, Abellion, je serais fort en peine de vous répondre...Heureuse cependant de ne pas avoir du recourir à ce métier-là...<br /> Amitiés<br /> Héléna
Répondre
A
<br /> Oui, en parlant de ce genre de sujets, on pourrait se dire comme Lucrèce que cela ne coûte pas grand chose de voir les naufrages des autres depuis le rivage... Amitiés.<br /> <br /> <br />
H
Ou une revanche, peut-être?<br /> Certaines femmes ont un pouvoir redoutable sur le désir des hommes...<br /> Il me semble avoir lu chez Zola,(Nana,), l'histoire d'une de ces jolies mondaines faisant payer de riches barbons avec l'intention de faire vivre leur amoureux désargenté...
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A
<br /> N'est-ce pas une forme de générosité finalement, vu sous cet angle ? On peut même dire qu'elles ont un côté "Robin des Bois" ! Cela tendrait à prouver, au final, que le corps est une arme<br /> comme une autre, pour parvenir à ses fins, et l'amour (en tout cas stipendié) est un combat dont le plus rusé ou le plus fin sait sortir vainqueur...<br /> <br /> <br />