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8 mai 2008 4 08 /05 /mai /2008 22:00

 

 Maurice Magre fut de son vivant un écrivain reconnu, que ce soit à Toulouse comme dans tout le pays. Poète, romancier, dramaturge, essayiste… il s’est essayé à toutes les formes d’écritures. Mais ses curiosités ne furent pas seulement littéraires, et sa vie fut également un terrain d’expérience. Comme beaucoup d’écrivains de la génération de 1890 (Lorrain, Mirbeau), il a connu l’ivresse d’un Paris désabusé de la Belle époque aux couleurs de décadence, marqué par le sexe, l’opium, mais aussi une réelle quête d'absolu et d'idéal. De tous ces paradis plus ou moins artificiels, il a retenu, en grand écrivain, la matière d’une œuvre riche.

 

 

(Magre en 1906)


I. Mes rencontres avec Maurice Magre.

 

Ma première rencontre avec Maurice Magre ? Un jour, alors que je gravissais la route escarpée qui mène au vieux castel de Montségur sous un soleil de plomb, je pris un petit sentier bordé de buis. Et là, au bout d’une dizaine de mètres, je me trouvai en face d’une étrange stèle dédiée « Au poète Maurice Magre ». J’avoue que le froid profil de granit, aussi gai qu’un monument aux morts, n’étaient guère un incitatif à la découverte… Mais la présence de l’effigie de cet homme en ce lieu posait problème, et je me la mis derrière l’oreille…  

 

Ma deuxième rencontre avec Maurice Magre ? Ce fut chez un libraire de Montolieu, où je tombai au hasard des rayonnages sur ce titre étonnant et paradoxal : Lucifer, roman moderne. Un ouvrage plein de bruit et de fureur, avec, autour de la quête d’un trésor mystérieux (un talisman ayant appartenu à Simon le Magicien), des scènes baroques, de messes noires qui n’avaient rien à envier à celles de Huysmans dans Là-bas  Le sortilège était jeté ; j’allais désormais devenir collectionneur fanatique de ses œuvres !

 

II. L’univers de Maurice Magre.

 

Plus tard, je découvris ses autres romans aux noms évocateurs, La luxure de Grenade, Le Sang de Toulouse, Le Trésor des Albigeois, qui tous dessinaient la géographie sublime d’un univers fictionnel fascinant : femmes sublimes, trésors cachés, sociétés secrètes, héros épris d’absolus.

 

Ces romans mettent d'abord en scène des figures féminines inoubliables. Des femmes angéliques, comme la mythique cathare Esclarmonde, ou au contraire lascives, au charme maléfique, comme l’inoubliable Isabelle de Solis, incarnation de la luxure, qui dort mollement sous le regard des hommes, les seins écrasés sur les marbres de la Grenade du XVe siècle.

 

On assiste à la quête d’un trésor sacré, symbole d’une pureté et d'une spiritualité inaccessibles, que les personnages cherchent généralement en vain : l’arche d’alliance dans la Luxure de Grenade qui finit perdue au fond de la mer, le graal dans le Trésor des albigeois, le trésor cathare dans le Sang de Toulouse.

 

On croise aussi généralement dans ces fictions d’étranges sociétés secrètes mythiques, les unes profondément spirituelles (les Rosicruciens dans La Luxure, ou bien les cathares), les autres grossièrement matérielles et sataniques (sectes d’adorateurs du démon sous toutes leur formes etc.), ce qui donne lieu à d'étonnantes scènes, dont la plus frappante est la messe de Sant Secari dans le Sang de Toulouse.  

 

Enfin, le héros des récits de Magre par-delà ses erreurs, découvre que la réalité du monde est finalement invisible pour les yeux, et visible seulement avec le cœur… Car l’amour tient lieu de vraie connaissance, comme le dit Magre à la suite de Platon, dont il aimait par-dessus tout cette phrase admirable : « Il me semble que les hommes ont jusqu’ici totalement méconnu la puissance de l’amour ».  

 

Les esprits chagrins diront que tout cela est bien romanesque, mais qu’ils lisent les romans de Magre, son style et sa distance faite à la fois d’onirisme et d’ironie à l’égard de tout ce qu’il traite… Ainsi ce passage éblouissant d’ironie où la troublante Isabelle de Solis utilise l’arche d’alliance pour ranger ses babouches… Son côté « la tête dans le ciel, mais les pieds sur terre », qui fait voisiner en lui la quête d’absolu avec la lucidité moraliste la plus crue sur le cœur humain, balancé entre Eros et Thanatos. C'est cela qui fait le style inimitable de Magre.  

 

Qui était-il ?

C’est ainsi que, de l’œuvre, je me suis mis  à m’intéresser à l’individu. On ne trouve pas facilement des renseignements sur lui. Je n'ai pas encore mis la main sur sa bibliographie, par J.-J.Bédu. Sa tombe existe encore au cimetière de Terre-Cabade à Toulouse. Mais pour le connaître de l'intérieur, rien de tel que de lire l’ouvrage où, sous forme de courts essais thématiques et sans souci chronolgique excessif, il a évoqué les moments forts de sa vie. Ce sont les Confessions qu’il écrivit à l’âge de 53 ans en 1930, et qui parlent principalement de la jeunesse de Magre, mais aussi des tendances profondes de sa personnalité dont il dit lui-même qu'elles s'originent dans cette période de sa vie.   

 
« … ce que j’ai péniblement amassé par l’expérience ou la lecture des livres et qui informe les quelques convictions sur lesquelles mon esprit se repose, je l’avais en moi à 20 ans. Mais nul ne croit assez en sa jeunesse ». 


III. la jeunesse et la formation de Magre à Paris.

 

L’arrivée d’un toulousain à Paris.

Maurice Magre est né à Toulouse le 2 mars 1877, fils d’un avocat et journaliste toulousain. Il écrit très tôt, admire le Gide des Nourritures terrestres et lui envoie ses premiers essais. A peine âgé de 20 ans, il monte à Paris pour faite carrière dans la littérature. Il mène alors un temps une vie assez misérable. Le jeune méridional affronte alors, dans une chambre inconfortable, le froid parisien :

 

« A travers les carreaux mal lavés, ce que j’apercevais de Paris était ténébreux et menaçant. Comme cela était différent des villes du Midi, avec leurs amicales maisons basses… »

 

 

Le goût des femmes.

C’est aussi dès sa jeunesse qu’il devient un amateur de femmes, certains diront même un familier des maisons closes. Il déplorera plus tard, lors de sa maturité, comme « cette sorte de maladie morale qui consiste à désirer perpétuellement la forme et la présence de nouvelles femmes ». Le jeune Maurice, à 20 ans, pense trouver la perfection au bout de la volupté ; son double quinquagénaire dira qu’à travers les aventures, c’est finalement une quête d’absolu et de perfection qui s’exprimait déjà. Il dit d'ailleurs qu’il existait en lui deux hommes, l’un en quête de nourriture intellectuelles, l’autre de satisfactions plus sensibles :

 

« Dans le même temps où commença à grandir en moi un souci plus vif du développement  de mon intelligence se déchaîna un goût extraordinaire pour la forme des femmes, la beauté de leurs visages et de leurs corps ».


Cet amour des femmes est présent à chaque page de son œuvre romanesque, où l’érotisme est présent, dans ses formes les plus variées… Si vous voulez en savoir plus, allez donc voir vous-même !

 

La vie à la capitale dans les années 1900 d'après Magre.

La vie de la capitale, dans la pauvreté, n’est guère agréable, mais le jeune Magre y apprend à aimer les transports en commun, lorsqu’il y voit un jour Jean Jaurès s’asseoir modestement entre deux grosses dames et se plonger dans la lecture des tragédies de Racine ! Il y connaît aussi des figures généreuses. Générosité des amis qui louent la beauté de sa petite chambre. Générosité d’un marchand de vin, Sicard, qui fait crédits aux poètes sans le sou comme lui.  Enfin, générosité de celles que Magre appelle, sans pudibonderie, des « bienfaitrices », et qui donnaient contre un bock ou un café, de la tendresse aux jeunes hommes solitaires.

 

Maurice Magre voisine alors toutes les tendances du Paris 1900. Il rencontre des anarchistes. Il croise Willy et Colette dans les cafés à la mode. Il visite un jour Pierre Louÿs, dans son étrange collections de gravure et de bas-reliefs représentant des sexes de femmes… L’éditeur Fasquelle, avec qui il deviendra ami, publie son premier recueil de poèmes, « la  Chanson des hommes » (1898). Fasquelle qui avait connu Zola, mais dont Magre nous révèle qu’il ornait sa bibliothèque de rangées de faux livres constitués par des panneaux de bois…

 

La rencontre avec l’énigme de la mort.

La jeunesse de Magre marque aussi sa première rencontre, aussi, avec le mystère de la mort et de l’au-delà… Magre assiste ainsi à la mort de sa propriétaire, vieille dame solitaire qui a la prémonition de sa fin. Incapable de lui dire quoi que ce soit, il décide alors de déchiffrer cette énigme de la condition humaine :

 

« Derrière ce que je croyais être un monde vrai, j’entrevoyais un autre monde, un double plus subtil et plus beau… Je devais revenir à l’âge de cinq ans, apprendre à lire dans l’alphabet de l’âme, essayer de déchiffrer le livre magnifique de la mort. »

 

Il abandonne alors son credo matérialiste commode pour se lancer dans une quête spirituelle qu’il n’abandonnera jamais jusqu’à sa mort. Disons quelques mots de cette quête spirituelle capitale pour Magre.

 

IV. Les paradis artificiels et la quête d’un ailleurs.

 

 (Magre en 1913)


L’opium, porte d’un autre monde ? 

C’est aussi à Paris que Magre rencontre l’opium, qui sera amené à jouer un rôle central dans sa vie et, étrangement, dans sa quête d’absolu. Il est initié par une jeune femme blonde aux troublants yeux verts, qui l’invite à fumer chez elle, à une époque où cette drogue est fort répandue. Et dès la première expérience, quelque chose lui fait « pressentir le monde des choses cachées ». Reprenant des conceptions chinoises, Magre parle dans les Confessions de la déesse qui accompagne le fumeur d’opium, déesse double qui peut tout ainsi bien faire rétrograder le fumeur à l’état de bête, ou l’élever à un état de conscience supérieur :

 

« Pour tout ceux qui fument une porte est ouverte sur les mondes supérieurs. Mais il n’est pas donné à tous de croire à son existence et de la franchir. »

 

Cette expérience de l’opium, Magre la rapporte, malgré son étrangeté, avec une absence de fausse pudeur, une sincérité et une simplicité qui la rendent étrangement plausible. Pour lui, il est possible de se discipliner suffisamment pour éviter la dépendance. Mais lisez-le donc dans les Confessions 

 

L’appel de l’Orient.

Cette quête d’absolu, que Magre recherchait dans toute son expérience humaine, que ce soit celle de l’amour ou de l’opium, se concrétisera finalement dans l’intérêt pour les philosophies de l’Orient. Magre possédait une sorte d'objet fétiche, un bouddha magique, sculpté par un bonze dans le bois d’un palétuvier frappé par la foudre. Et il fut intéressé par les philosophies orientales, au point de publier un ouvrage intitulé Pourquoi suis-je bouddhiste. Il passa d'ailleurs en 1935 quelque temps en Inde, dans un ashram.   

 

L’Asura.

Magre ne se contente pas de rêver le spirituel, de l’approcher par des traités, il le vit. Il fait dans ses Confessions le récit étonnant d’une apparition étrange qui lui advint un jour à son réveil. Apparition qu’il interprète comme celle d’une créature supérieure, non sans une pointe d’humour : 

 

« Une robe longue jusqu’aux pieds indiquait une créature féminine. La taille dépassait la moyenne humaine, lui donnant l’apparence d’une géante svelte. Il y avait une sorte de rigidité dans la taille, et si un être divin est susceptible de porter un corset à baleines selon la mode de 1880 je dirai que celui-là en portait. »

 

Magre expérimente alors un sentiment étrange de consolation et d’apaisement. Il explique cette expérience étrange par la croyance en une hiérarchie d’être invisibles chargés de guider l’homme sur le chemin de la vérité: asuras, daimons ou anges gardiens. Voilà ce qu’il répond aux sceptiques : « Les gens raisonnables souriront ou peut-être s’indigneront, mais il n’importe ! J’ai renoncé à leur suffrage ».

 

Le monde invisible.

Magre nous apparaît ainsi comme un cas unique d’écrivain spiritualiste au XXe siècle. Si cela est singulier, et si ce mélange d’érotisme et de spiritualité sent le souffre, pourquoi mépriser son témoignage en un époque où les divers matérialismes, dialectiques ou pas, faisaient des morts par millions ? En effet, chez lui se lit le credo platonicien éternel, que les causes d’un monde visible sont cachées dans une réalité invisible, même si celle-ci n’est visible qu’indirectement, et l’espérance profonde en une autre vie :

 

«  Je sais qu’autour de moi se déroule la féerie du monde spirituel, où s’élaborent les causes du monde matériel, où la beauté est permanente, où l’amour est l’élément essentiel dans lequel tout se meut. »

 

La quête du bonheur.

Une conviction profonde anime en effet l’œuvre de Magre: l’homme, s’il surmonte les appétits de haine qui le poussent à sa propre destruction, est un être capable de bonheur et de sérénité, totalement exempte de la douleur :

 

« L’état normal de l’être, quand il est débarrassé de la peur, du désir de l’appétit de possession, est un état de joie béatifique, d’allégresse extasiée. Ce sont les sollicitations des sens et celles de la partie inférieure de notre intelligence qui troublent cet état et rendent l’homme si prodigieusement apte à souffrir ». 

 

Cette croyance en une essence spirituelle de l’homme, dégagée des passions, il la tenait de ses lectures spirituelles étendues, dont son dernier roman Mélusine, sorte de testament spirituel sous forme fictionnelle, donne une idée. Le personnage principal y possède en effet une bibliothèque idéale où Spinoza voisine maître Eckhart, Plotin et les Védas.

 

 

Bref…

Qui était donc Maurice Magre ? Un homme de sa génération perdu entre le goût de l’ésotérisme parfois frelaté et les drogues ? Un spirituel authentique ? Un grand écrivain méconnu ? Il est peut-être tout cela à la fois… Il est avant tout celui qui a fait aimer au grand public l’époque cathare, même si c’étaient sous les couleurs de la légende et du mythe : mais qu’importe, puisque, comme l’a si bien dit Aristote, la poésie est plus philosophique que l’histoire !

 

Œuvres principales.

Poésie. La Chanson des hommes, 1898. Poèmes de la jeunesse, 1901. Les Lèvres et le secret, 1906. Les Belles de nuits, 1913.

 

Romans.
Priscilla d’Alexandrie, 1925: les néoplatoniciens d'Alexandrie.
La Luxure de Grenade, 1925: la chute de l'Espagne musulmane.  
Le Mystère du Tigre, 1927. Le Poison de Goa, 1928.
Le Sang de Toulouse. 1931: l'épopée cathare dans sa version légendaire.  
Le trésor des Albigeois, 1938: une quête du Graal au XVIe siècle en Occitanie.


Essais et mémoires. Les Confessions, 1930. L’amour et la haine, 1934. La Clé des choses cachées, 1935. La Beauté invisible, 1937.

 

Les oeuvres de Magre sont rarement rééditées, en particulier sa poésie et son théâtre. les romans se trouvent encore assez facilement chez les bouquinistes et dans les vide-greniers.

Etudes.

Robert Aribaut, Maurice Magre, un méridional universel, Toulouse, Midia, 1987.

Jean-Jacques Bédu, Maurice Magre, Le lotus perdu, éditions Dire.

 

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commentaires

O
I want to direct the attention of my favorite readers to one particular thing which is especially particular to the pictures in the blog. I bet you guys haven’t seen some very distinct signatures on the pictures and those are the signature of the creator if the pictures.
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